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Contrat de travail non signé - valable (oui)- résiliation par Facebook Messenger - abusif ? (oui)

Arrêt de la Cour d'appel de Luxembourg du 8 janvier 2021


Le contrat de travail ou d’emploi s’analyse en substance comme la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération.


Il est constant en cause que les parties n’ont pas signé de contrat de travail.


Les juridictions ne sont toutefois pas tenues par la qualification ou l’absence de qualification par les parties. Les tribunaux qualifient, respectivement requalifient, librement la relation de travail, au vu de la situation réelle. Ils vérifient la prestation de travail, la rémunération et principalement l’élément déterminant de toute relation de travail, à savoir le lien de subordination : il faut que le salarié ait été placé sous l’autorité de l’employeur, qui lui donne des ordres concernant l’exécution du travail et en contrôle l’accomplissement.


C’est à juste titre que le tribunal du travail a examiné un faisceau d’indices pour forger sa conviction : - il ressort effectivement des pièces versées en cause qu’B était affiliée au centre commun de la sécurité sociale depuis le 1er mars 2017 auprès de l’employeur « A », suivant certificat d’affiliation du 5 octobre 2017.


Aux termes d’un certificat d’affiliation du 19 octobre 2017, cette affiliation aurait pris fin le 31 août 2017. Suivant la fiche reprenant les déclarations au centre commun de la sécurité sociale, B était engagée depuis le mois de mars 2017 par A, à raison de « 8 heures par semaine », avec comme activité « ménage », - il découle des échanges « SMS » entre parties, qu’A reconnaît devoir payer des taxes (elle fait sans doute allusion à la part patronale) pour B, que cette dernière s’excusait aussi auprès d’A en cas de maladie, et qu’elle lui indiquait les heures de travail réellement prestées, et les périodes pendant lesquelles elle partait en vacances. Il en résulte encore que le terme de « travailler » est souvent utilisé dans ces échanges et qu’B demande à A ce qu’elle doit faire comme travaux.


Il découle finalement du message du 27 août 2017 à 16.29 heures, en réponse à la demande d’B du même jour à 14.50 heures si elle doit travailler le lendemain, qu’A l’informe de la fin du contrat, parce qu’elle aurait trouvé quelqu’un d’autre, ajoutant qu’elle espère qu’B va retrouver un « replacement » et qu’elle peut lui donner « un recommendation si vous avez besoin ».


Il s’agit manifestement d’une décision unilatéralement prise par A, sans accord d’B. De ce qui précède, il découle qu’A avait le pouvoir de direction et de contrôle sur B et que les relations entre parties étaient caractérisées par un lien de subordination.


Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu que « les parties étaient liées par un contrat de travail à durée indéterminée à partir du 1er mars 2017 » et que « le tribunal du travail est dès lors compétent ratione materiae pour connaître des demandes d’B ».


Les juridictions du travail étant compétentes, la Cour analyse les différents chefs de la demande d’B. La fin de la relation de travail Le licenciement est la rupture unilatérale du contrat de travail, à l’initiative de l’employeur.


Le tribunal du travail a rappelé à juste titre les principes élémentaires entourant cette notion, à savoir que la décision de licencier est unilatérale, qu’elle n’a pas besoin d’être acceptée et que cette décision est irrévocable.


Le message envoyé le 27 août 2017 par A à B traduit la volonté non équivoque de mettre fin, avec effet immédiat, à la relation de travail. Cette volonté est confirmée par la désaffiliation de la salariée, certes tardive, mais néanmoins avec effet au 31 août 2017, auprès du centre commun de la sécurité sociale.


Aux termes de l’article L.124-10 (3) du Code du travail, le licenciement avec effet immédiat doit être fait par écrit et énoncer avec précision le ou les faits et fautes reprochés au salarié, ainsi que les circonstances qui sont de nature à leur attribuer le caractère de motif grave. Une telle motivation ne figure pas dans ce message du 27 août 2017, qui se lit comme suit : « Bonjour B ! Nous sommes oblige de finir notre contrat, tres triste pour moi, parce que nous avons trouver le nouvelle gouvernante (nanny) et c’est beaucoup plus facile et profitable pour nous de faire de menage avec la meme company, que organize aussi aide pour la maison. J’espere que vous allez trouver sans probleme un replacement pour nous,c’était un grand plaisir de vous connaitre. Et je peux vous donner un recommendation si vous avez besoin ! ».


A tente de se justifier en affirmant avoir envoyé un courrier de licenciement en date du 23 août 2017. Ce courrier, pour lequel l’envoi n’est nullement établi, comprend de plus une contradiction : il est daté au 23 août 2017 et fait référence à un contrat de travail à l’essai conclu le 24 août 2017.


Il est encore contredit par les dates des affiliations de la salariée auprès du centre commun de la sécurité sociale. Il n’y a dès lors pas lieu de prendre en compte ce courrier.


Faute de motivation, le licenciement d’B est abusif ab initio.

LEGALOZ avocat luxembourg
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