Arrêt de la Cour d'appel du 23 octobre 2019
Saisi des demandes de la SOC.1 dirigées contre A. et son épouse B. tendant au paiement des montants de 56.140,94 euros et 52.610,08 euros du chef de soldes redus sur des travaux de transformation d’une grange en maison d’habitation et de la demande reconventionnelle des époux A.-B. en paiement du montant de 129.000 euros au titre de pénalités de retard et de 10.000 euros au titre de dommage moral, ...
..c’est à bon droit que le contrat d’entreprise du 19 juin 2014 a été qualifié de marché à forfait soumis aux dispositions de l’article 1793 du code civil, le contrat prévoyant un prix forfaitaire et se référant tant aux plans d’architecte qu’au bordereau de soumission établi par le bureau d’ingénieurs-conseils qui énumère avec précision les travaux à exécuter et le contrat prévoyant que les changements ou augmentations par rapport au plan initial convenu devront être autorisés par écrit par le maître de l’ouvrage....
Concernant le solde redû sur le prix forfaitaire des travaux de 279.966,67 euros tel que facturé par la SOC.1, il est constant en cause que les époux A.-B. ont réglé des acomptes à hauteur d’une somme de 241.800 euros. Ils retiennent actuellement le solde au titre de la garantie de 10%, argumentant qu’aucune réception des travaux n’aurait eu lieu.
La Cour approuve les juges de première instance d’avoir admis qu’il y a eu en l’espèce une réception tacite des travaux par la prise de possession des lieux par les intimés qui habitent la maison et ne critiquent ni l’état d’achèvement, ni la qualité des travaux de construction réalisés par la SOC.1, de sorte que la demande a été à bon droit déclarée fondée..
A l’appui de son appel, la SOC.1 réclame un montant supplémentaire de 59.312,90 euros au titre des factures ..du chef de suppléments que les époux A.-B. auraient commandé en cours d’exécution du chantier.
...il y a lieu de faire une distinction entre les travaux supplémentaires nécessaires à l’exécution de l’ouvrage initial conformément au contrat et dont le coût est compris dans le forfait et reste à charge de l’entrepreneur et ceux qui modifient l’objet du contrat et donnent lieu à rémunération supplémentaire, dès lors qu’ils font l’objet d’un contrat séparé, ces travaux devant avoir été préalablement autorisés par écrit par le client.
Concernant la facture no. 2016-0018 ..., la SOC.1 prétend qu’il s’agit de travaux de stabilisation imprévisibles pour l’entrepreneur et qui n’étaient pas connus lors de la conclusion du contrat..... Tel que l’a correctement admis le tribunal, cette facture doit rester à charge de l’entrepreneur, dès lors que les travaux de mise en place de la paroi berlinoise étaient indispensables pour éviter l’effondrement du terrain voisin et la déstabilisation du garage existant et que le constructeur, en tant que professionnel, aurait dû savoir que ces mesures de stabilisation étaient nécessaires afin de réaliser les travaux de terrassement selon les règles de l’art....
Concernant la facture no. 2016-0019..., la partie appelante soutient que les intimés ont remis en cours d’exécution des travaux de nouveaux plans prévoyant la démolition et la reconstruction du garage, alors que les plans à la base de leur offre auraient prévu sa conservation...
La Cour se rallie aux développements des juges de première instance à ce titre qui, après avoir rappelé que l’entrepreneur qui entend obtenir un complément de rémunération par rapport au prix forfaitaire convenu doit suivre la procédure prévue à l’article 1793 du code civil et obtenir une commande séparée écrite de la part du maître de l’ouvrage pour les travaux supplémentaires mentionnant un prix convenu, ont constaté que la preuve de l’existence d’un tel écrit faisait défaut, de sorte que c’est à juste titre que la SOC.1 a été déboutée de ce volet de sa demande....
Le même raisonnement a été à bon escient appliqué ... concernant la facture... ayant trait au rehaussement des murs et à la modification de la charpente, la facture .. relative à la construction d’un bac à fleurs.., la facture no.2016-0079 se rapportant à la fourniture et pose de trappes d’un montant de ...
En effet, les travaux mis en compte dans les factures prémentionnées n’ont pas été compris dans le forfait initial et l’entrepreneur n’est pas en mesure de verser une commande supplémentaire écrite pour ces travaux contenant la mention du prix convenu entre parties, la seule réalisation des travaux au profit des intimés ne justifiant pas leur paiement et la seule remise par le maître de l’ouvrage de nouveaux plans d’exécution étant insuffisante pour valoir commande au sens des dispositions de l’article 1793 du code civil.
...la ratification par le maître de l'ouvrage de travaux supplémentaires exécutés sans son autorisation écrite ne peut résulter que d'une acceptation expresse et non équivoque (Cass. 3e civ. 24.1.1990, B.C. III, n° 28), voire d’un acquiescement tacite, à condition que celui-ci soit exempt de toute ambiguïté, respectivement qu’il résulte d'un comportement non équivoque à l'achèvement et surtout à la réception (cf. Cass. 3e civ. 20.2.1973, D. 1973, Inf. rap. 92; JCL Civ. art. 1788 à 1794, fasc. 20, n° 65).
Ainsi le simple fait que les travaux supplémentaires n'ont pu échapper à l'attention du maître de l'ouvrage ne peut valoir acceptation tacite de ces travaux....
Il suit des développements qui précèdent que la demande de la SOC.1 a été à bon droit déclarée non fondée..
Quant à la demande reconventionnelle en paiement de pénalités de retard pour la période du 1er décembre 2014 (date prévue au contrat pour l’achèvement des travaux) au 30 avril 2016 (date à laquelle les travaux étaient en fait terminés), ...il est toutefois constant en cause que des travaux ont encore été exécutés après le 1er décembre 2014,... de sorte que la Cour retient, à l’instar du tribunal, que les époux A.-B., en ne s’opposant pas à l’exécution de travaux après la date conventionnelle d’achèvement et en ne mettant pas l’entrepreneur en demeure d’achever les travaux dans le délai initialement convenu, ont implicitement renoncé à ce délai...
Il en est de même de la demande reconventionnelle en octroi de dommages-intérêts pour préjudice moral en l’absence de preuve d’un tel préjudice dans le chef des époux A.-B.. Il suit des développements qui précèdent que ce volet de l’appel incident est encore non fondé. Le jugement entrepris est, partant, à confirmer dans toute sa teneur...
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