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Compromis de vente - condition suspensive - Silence du vendeur = prorogation tacite du délai (non)

Arrêt de la Cour d'appel du 22 mai 2019


Le 9 février 2016, B.) et son épouse C.) ont signé avec A.) un compromis de vente par lequel ils lui ont vendu leur appartement sis à Luxembourg au prix de 375.000 euros, étant précisé au compromis que l’acte notarié sera signé le 15 mars 2016 au plus tard.


Le compromis de vente était conclu sous la condition suspensive de l’obtention par l’acquéreur d’un crédit auprès d’un organisme financier de son choix, aucun délai n’étant fixé pour l’accomplissement de cette condition.


L'article 1176 du code civil prévoit que « lorsqu'une convention est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps fixe, cette condition est censée défaillie lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé.


S'il n'y a point de temps fixe, la condition peut toujours être accomplie et elle n'est censée défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas. »


Il s'ensuit que si aucun délai n'a été fixé pour la réalisation de la condition suspensive, tel le cas en l’espèce, la situation se règle d'après les dispositions de l'article 1176 du code civil.


Toutefois, l’article 1175 du code civil prévoit que toute condition doit être accomplie « de la manière que les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu’elle le fût ».


En l’espèce, les parties ont prévu au compromis que l’acte notarié sera signé au plus tard le 15 mars 2016. Le tribunal en a, à juste titre, déduit que les parties ont implicitement entendu retenir la date du 15 mars 2016 pour l’obtention ou le refus du prêt bancaire à solliciter par l’acquéreur, délai au demeurant raisonnable puisqu’il laissait à l’acquéreur un délai de cinq semaines à partir du compromis pour faire des démarches en vue de l’obtention du crédit.


A.) prétend que les vendeurs auraient tacitement renoncé au délai du 15 mars 2016 en ne réagissant pas à son courriel du 11 mars 2016. Par courriel du 11 mars 2016, A.) a informé B.) dans les termes suivants : « ..J’ai reçu un refus d’une de mes banques, comme motif que le prix est trop élevé. ...Mercredi prochain j’aurai rendez-vous auprès d’une seconde banque ». A.) ayant demandé à B.) un rendez-vous pour une visite de l’appartement, ce dernier, par courriel du 17 mars 2016, a confirmé le rendez-vous tout en précisant « J’insiste sur le fait que l’accord de la banque doit être obtenu pour le 31 mars.


Passé cette date, le compromis de vente tombera. » Par courriel du même jour, A.) a répondu que la banque avait besoin de deux semaines pour examiner le dossier une fois que celui-ci est complet, tout en ajoutant : « Donc il faut compter avec les vacances jusqu’au 5/6 avril et deux semaines plus tard chez le notaire. Date limite de l’acte le 21 avril. »


Il est admis que les parties peuvent renoncer aux conséquences juridiques du dépassement du délai. Cette renonciation, qui peut être implicite ne se présume toutefois pas du seul fait que les parties ont laissé passer la date sans réagir (Cour d'appel, 1re ch. 12.12.2007, rôle 31900).


Il s’ensuit que l’absence de réaction des vendeurs non seulement au courriel de l’acquéreur du 11 mars 2016, mais également à l’écoulement du terme du 15 mars 2016 ne saurait valoir renonciation audit délai.


L’appelant considère encore que les vendeurs ont implicitement prorogé le terme au 31 mars 2016 par leur courriel du 17 mars 2016. Une prorogation tacite du terme d’une convention d’un commun accord des parties ne peut se déduire que de faits intervenus antérieurement à l’arrivée du terme (Cour de cassation, 29 juin 2006, P.31, p.440 ; Cour d’appel, 16 mars 2011, n° 35036 du rôle).


Force est de relever que le courriel précité des vendeurs du 17 mars 2016 ne saurait être pris en compte à l’effet de prouver une prorogation tacite du délai de la condition suspensive, dès lors qu’il est postérieur à la date butoir du 15 mars 2016.


En outre, un accord des parties quant à une prorogation du délai laisse d’être établi, les vendeurs ayant fait état de la date du 31 mars 2016, alors que l’acquéreur a évoqué la date du 5/6 avril 2016, de sorte que l’argumentation de l’appelant ayant trait à la conclusion d’un nouveau contrat entre parties est, pour les mêmes motifs, également à rejeter.


Lorsqu’une obligation est contractée sous condition suspensive, tel le cas en l’espèce du compromis signé par les parties soumettant la conclusion de la vente à la condition que l’acquéreur obtienne un crédit bancaire dans un délai fixé, la simple défaillance de la condition suspensive empêche l’obligation de prendre naissance, les parties étant dans la même situation que si elles n’avaient pas contracté, tandis que la réalisation de la condition fait rétroagir la convention conclue.


En l’espèce, il est constant en cause que A.) n’a pas eu d’accord d’une banque lui accordant un prêt pour la date du 15 mars 2016, la banque contactée par l’acquéreur ayant opposé un refus à sa demande.


Le tribunal en a, à bon droit, déduit que le compromis était devenu caduc et que la demande subsidiaire en résolution de la vente n’était pas fondée, aucun contrat de vente ne s’étant valablement formé. La demande reconventionnelle de A.) en passation d’acte a également, à juste titre, été rejetée.



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